bouchon de carafeL’abolition des privilèges permet à des particuliers et bourgeois de relancer cette industrie en Thiérache, et surtout à sa lisière septentrionale, en Fagne. Les DE COLNET voient leur verrerie de Montplaisir concurrencée. Dès 1792, une verrerie dite interne voit le jour au Nouvion-en-Thiérache et durera pendant 40 ans. Plus besoin d’être noble ou d’avoir les secrets de fabrication pour pouvoir créer une verrerie. Suffisent des capitaux et de l’audace. Parmi ces créateurs d’entreprises, citons Jacques MILLET, laboureur, qui crée une verrerie à Saint-Michel-en-Thiérache en 1802, au cœur même des bâtiments de l’Abbaye, ce qui permit de les sauver. Cette verrerie dure quelques années, mais périclite. Ses verriers venus de Monthermé, partent pour la toute nouvelle verrerie blanche de Sars-Poteries, crée dès 1803 par les consorts RINCHEVAL-PICAVET-DELACHINAL, et qui perdura dans la production du flaconnage jusqu’en 1937. L’explosion industrielle continue en 1804, lorsque M. BERNAILLE fonde une gobeletterie à Anor, sur l’emplacement de l’ancienne verrerie. Nous ne citerons pas la verrerie d’Haumont (59330) fondée la même année et qui sort de notre cadre d’étude. Revenons dans les vallées de l’Helpe. La création de verreries semblent y avoir une concurrence féroce : en 1807, le Comte DE MERODE crée une verrerie à bouteille à Trélon (59132). A Trélon encore, Rigobert PAILLA, marchand, dont la fille vient de se marier à H. E. COLLIGNON  » régisseurs de verreries  » fonde une verrerie blanche en 1823. La même année s’ouvre la verrerie de Landrecies (59550), au Sambreton . Glageon (59132) aussi sera doté de sa verrerie propre grâce à M. DUBOIS en 1899. Un peu plus au nord, Rance est probablement la dernière verrerie de type forestière à être fondée, en 1808.

Un dernier facteur accentue encore l’implantation des verreries dans notre région : c’est la maîtrise du processus de la champagnisation, et quelques décennies plus tard, la construction du chemin de fer qui permettra l’acheminement des matières premières et l’exportation de la production. Le chemin de fer devient un enjeu primordial : des verreries à bouteilles, dites  » verreries noires « , s’ouvrent sur la ligne ferroviaire de Fourmies en 1868 (jusqu’en 1914), Anor et Hirson (02500) en 1869. A la fin du siècle, on essaie de relancer les verreries de Quiquengrogne (1894, par la verrerie SCHMITT de Valenciennes) et celle du Garmouzet qui périclitent lentement de 1860 à 1910. La concurrence que se mènent ces nombreuses verreries les réduit à un nombre plus restreint ; la première guerre mondiale et la mécanisation remplaçant le soufflage feront le reste. A noter que deux verreries naîtront de la mécanisation : celle dite de Saint Antoine au Nouvion-en-Thiérache (1909-1971) fabrique du verre creux. Celle de Le Quesnoy (Nord, 1924-1947), qui se concentre sur l’outillage électrique, est peut-être la dernière verrerie de la région à s’être crée.

verresLa dernière verrerie en activité sera celle de Trélon, éteinte en 1977, qui sera heureusement transformée en écomusée. Un musée du verre s’est également créé à Sars-Poteries sous l’impulsion primordiale de l’Abbé MERIAUX dans les années 1970 pour évoluer depuis en un ambitieux MusVerre. Pourtant, la verrerie n’est pas encore totalement éteinte. Il existe encore actuellement, à Sars-Poteries (en Fagne), un atelier de formation aux techniques verrières, dirigé par M. BON et où des verriers du monde entier viennent partager leurs connaissances et leur amour de cette matière sous la forme de stages.

Les quelques modestes lignes de cet exposé auront, je l’espère, donné de nouvelles ouvertures sur cette histoire régionale. D’autres verreries ont encore existé, mais les informations manquent, comme pour Solre-le-Château. La culture verrière ou encore les familles verrières les plus importantes auraient dû être abordées. Mais cet exposé n’est qu’une brève introduction au projet de GENVERRE qui souhaite notamment approfondir et vulgariser la mémoire verrière thiérachienne et de fagne. Le but de l’association GENVERRE tend à dresser les généalogies des verriers, et donc de retracer du même trait les routes verrières empruntées par nos ancêtres. C’est pourquoi l’association consacrera un hors-série de sa revue Éclats de Verre sur l’histoire des verreries et des verriers en Thiérache et en Fagne, des origines à nos jours. Ceci est donc un appel à tous ceux qui seraient intéressés à y collaborer, qui voudraient faire des articles sur une verrerie, un relevé des verriers dans un village ou sur une famille verrière, voir un aspect de la culture verrière en Thiérache et Fagne.

Par Benoît PAINCHART, extrait de la revue « Eclats de Verre » n°8. 

Pour tout renseignement, me contacter à nebaeneg@yahoo.fr