La France libérée, Il reprend ses pinceaux

La France est libérée, l’Armistice est signé. Pierre Noël est engagé à titre officiel dans une nouvelle carrière. En 1944, il est nommé Peintre de la Marine. Il embarquera sur un premier navire « La Jeanne d’Arc » qui assure la liaison entre Toulon et les côtes d’Afrique du Nord. A lui d’avoir le pied marin !

L'attaque de l'église de Burelles

L’attaque de l’église de Burelles

En 1946, il sera à bord du « Richelieu ». C’est l’appel du large. Il se liera d’amitié avec les officiers de marine et certains de ses pairs, peintres de la Marine. Sur le pont du « Richelieu », il assiste à la prise de commandement du porte-avions « Arromanches » préalablement baptisé « Colossus » cédé par la Grande-Bretagne à la France.

Entre 1947-1950, Pierre Noël participe aux croisières d’avisos, des bâtiments de guerre conçus pour les missions lointaines, l’escorte et la protection des côtes ainsi que la lutte anti-sous marine. D’une inspiration débordante, il signe au large de Jersey « Le sillage de l’aviso Yser » en prenant vue depuis l’aviso « la Meuse » mouillé dans les eaux des fjords de Norvège. C’est toute la ligne des avisos de l’Ecole Navale dont il fait œuvre d’art. Il couche sur ses toiles et cartons des bateaux tel que le « Duguay-Trouin », la frégate « Escarmouche » en mer d’Irlande. Notre homme est infatigable.

Son horizon ne s’arrête pas à la rade de Toulon. Il se transportera au Cameroun, à Corfou, à Naples, à Los Palmas, aux îles Canaries, etc. Pierre Noël ne manque pas d’aplomb !

Art et honneur

L’appel des grands espaces marins, Pierre Noël l’avait encore en 1975. A 72 ans, il embarque pour plusieurs semaines sur la frégate « Duguay-Trouin ». Il a commande d’un panneau illustrant la vie de Duguay pour la décoration des appartements du commandant !

Ce thiérachien de cœur, sur le pont des bateaux était admiré de tous pour sa rapidité à saisir une silhouette, une scène, une tranche de vie. Avait-il encore à justifier sa qualité de Peintre de la Marine, dès alors qu’il avait mouillé l’ancre à Gercy où il avait peint « La ville de Vervins » ; « La route de Vervins à Gercy » ; « Les saules du Grand-Pré » ; « L’Oise à Dohis » ; « Les remparts de Vervins » ; « Neuve-Maison » ainsi que sur panneaux en bois précieux, généralement exotiques, rehaussés à la feuille d’or et d’argent, des pages d’histoire qui ont émaillé le vervinois avec notamment sous l’occupation : « La réquisition des chevaux de Vervins » ; « Le siège de Vervins » ; « L’attaque de l’église de Burelles » lors de la guerre de Cent ans.

La conclusion reviendra à Jean Ducros :

« Les registres de la sensibilité et de l’imagination artistique sont variés; c’est un charme de la vie dans les ateliers. Il y a toujours absence de monotonie auprès d’un véritable artiste. Pierre Noël a horreur de la monotonie, cela ne l’empêche pas d’avoir une écriture caractéristique, un style, des habitudes même, comme en ont les artisans. Pierre Noël paysagiste est le peintre attentif l’esprit tendu à capter ce qu’une inspiration supérieure lui propose. Pierre Noël illustrateur de livres est de même à l’écoute de l’auteur. Il se tient toute entier au service d’une pensée qu’il met fidèlement en forme ; mais quand il est décorateur ou encore quand il raconte avec un crayon et le pinceau une anecdote vue ou imaginée, Pierre Noël n’est plus pareil, il s’ébroue. Son trait devient plus baroque, la fantaisie lui fait commettre de petites folies chromatiques qu’il jugerait déplacées ailleurs ! Il s’amuse, il badine, il jongle. »

Jacky Billard