Le tracé gallo-romain, ancêtre de nos routes nationales

La vocation administrative et résidentielle de Bavay aurait favorisé le développement des ateliers en dehors de la Civitas. On a retrouvé des fours de potiers appartenant aux fabricants BRARIATUS et VARIATUS dont les tèles étaient exportées jusqu’en bordure rhénane. La voie franchissait ensuite, l’Helpe majeure à Fissiacum (Fuchau). Le toponyme pourrait faire référence à un ancien péage. Puis elle gagnait Duronum (Etroeungt) sur la rive gauche de l’Helpe mineure. Seule étape mentionnée par les itinéraires romains, elle était située à 12 lieues de Bavay. Le site occupe une position de hameau et épouse la pente douce du terrain. D’autres zones d’habitat repérées notamment à Warpont y étaient rattachées.

De Duronum, une desserte orientée est-ouest partait vers le Nouvion. D’autres situent Duronum à La Capelle, en raison de la borne milliaire trouvée en 1882. Une tradition veut que le lieu-dit La Ville conserve des traces d’occupation romaine. La chaussée prend résolument une orientation nord-sud, à hauteur de Larouillies et se confond sensiblement avec le tracé de l’actuelle RN2 jusqu’à Verbinum (Vervins) en passant par La Capelle, Froidestrées, Etréaupont et La Chaussée. Le vicus de Verbinum comportait un marché. Depuis un siècle, les fouilles ont révélé l’existence d’un théâtre (de 60 mètres dans son plus grand axe), d’un ollarium, d’une villa et de diverses substructions. Une autre voie venant de Vermand rejoignait Landifay (où fut mis à jour un cimetière gallo-romain) puis La Hérie et Sains. Elle traversait les bois de Marfontaine, Franqueville et Cambron (où se trouvait une villa).

La chaussée Brunehaut

La chaussée Brunehaut

La route parvenait au vicus de Vervins, se dirigeait vers le centre du plateau de Terva, le bois d’Eparcy, et traversait la forêt jusqu’à Macquenoise. A Macquenoise, des ramassages de surfaces et une fouille de sauvetage ont permis d’identifier un édifice thermal, une cave ainsi que des traces d’activité sidérurgique de la seconde moitié du IIe siècle/début du IIIe. Des carrières y étaient exploitées à ciel ouvert. L’arkose était employée dans la confection des meules-mortiers (dont l’aire de dispersion semble avoir été assez conséquente) et des urnes cinéraires. A proximité de la frontière, l’ouverture d’un chemin, au XIXe siècle, dans le canton des Aulnois permet la découverte d’un îlot d’habitats sans doute à mettre en relation avec l’exploitation du banc d’arkose qui s’étire sur plusieurs kilomètres depuis Mondrepuis.

De Verbinum, la voie Reims-Bavay prenait la direction de la Chaussée d’Hary, atteignait la Corrérie et traversait la forêt du Val-St-Pierre où son remblai est conservé. De là, elle joignait la station de Catusiacum (au nord de l’actuel village de Chaourse). Elle passait la Serre au lieu-dit Le Gué, suivait la limite départementale entre l’Aisne et les Ardennes, gagnait Dizy-le-Gros et Nizy-le-Comte. Ninitacus (Nizy-le-Comte) où furent découverts une borne milliaire, deux villae du IIe siècle richement décorées et un temple dédié à Belenus. Plus loin, le tracé suivait l’actuelle D966, traversait l’Aisne à Auxenna.

En parlant d’Evergnicourt, Amédée Piette, au XIXe siècle, affirmait qu’on pouvait voir les culées de l’ancien pont lorsque les eaux de l’Aisne étaient basses. La voie franchissait la Retourne à l’ouest de Brienne/Aisne, la Suippe à Pongivart, passait près de Brimont pour parvenir à Durocotorum (Reims; chef-lieu de la Civitas Remensis) par la porte de Mars. La voie Reims-Bavay fut peut-être abandonnée vers la fin du IIIe ou au début du IVe siècle. Au Bas-Empire, la Civitas Nerviorum est en effet remplacée par la Civitas Camaracensium; Cambrai devenant le chef-lieu de la nouvelle cité.