Sa participation à la préparation de la journée du 10 Août 1792

«Les hommes, qui se sont attribué la gloire de cette journée, sont les hommes à qui elle appartient le moins. Elle est due à ceux qui l’ont préparée, elle est due aux braves fédérés, et à leur directoire secret qui concertait depuis long-temps le plan de l’insurrection ; elle est due enfin au génie tutélaire qui préside constamment aux destins de la France, depuis la première assemblée de ses représentants.»

Sa participation active de à ces moments capitaux de la révolution, lui vaudra une nomination en tant que garde du sceau. Il devient donc le «maître de la justice» C’est cette application de la «justice» demandée par HEBERT et ses amis, par ROBESPIERRE et les siens, c’est en fait la terreur qui fera sortir Camille DESMOULINS de la réserve et du mutisme dans lequel il était depuis quelques temps rentré. Les Indulgents. Devant les excès de la terreur, une tendance s”est développée en France. Elle regroupe «Les Indulgents». Leur chef de file est Danton, leur porte parole est Camille DESMOULINS. Ils peuvent compter sur l”appui du Général Westermann qui sévit en Vendée. Ces indulgents souhaitent un retour à une paix intérieure et extérieure. L’attitude des indulgents paraît désintéressée, mais en fait, il en est autrement, en tout cas pour quelques uns de ses membres. Fabre d”Eglantine n’est-il pas compromis dans une histoire de spéculation financière… Dans les nombreuses luttes d’influence du moment, Robespierre englobera dans une même réprobation les HEBERTISTES, partisans de la terreur à outrance, et les INDULGENTS qui souhaitent l’arrêter.

Camille DESMOULINS Desmoulin au Palais Royal le 12 juillet

La naissance du «Vieux Cordelier». C‘était aussi l’époque où HEBERT, qui s’acharnait à dépopulariser Robespierre, s’opposait à DANTON. Une querelle de journalistes l’opposait également à DESMOULINS. Son journal, «Le Père Duchesne», traînait ses ennemis dans la boue, «plus bas que terre». Camille DESMOULINS lui répondait parfois en publiant des pamphlets. En Janvier (1793), DESMOULINS était encore quasiment muet.

«Un des derniers soirs du mois de janvier, DANTON, SOUBERDIELLE, juré du tribunal révolutionnaire, et Camille DESMOULINS sortirent ensemble du Palais de Justice. La journée avait été sanglante. Quinze têtes avaient roulé, le matin, sur la place de la révolution ; vingt-sept avaient été jugées à mort dans la séance, et dans ce nombre les têtes les plus hautes de l’ancienne magistrature de Paris. Ces trois hommes, le front abattu, le cœur serré par les impressions sinistres du spectacle qu’ils venaient d’avoir sous les yeux, marchaient en silence. La nuit, qui donne de la force aux réflexions et qui laisse échapper les secrets de l’âme, était sombre et froide. Arrivé sur le Pont-Neuf, Danton se tournant soudain vers Souberdielle : – Sais-tu bien, lui dit-il, que du train dont on y va il n’y aura bientôt plus de sûreté pour personne? Les meilleurs patriotes sont confondus, sans choix, avec les traîtres. Le sang versé par les généraux sur le champ de bataille ne les dispense pas d’en verser le reste sur l’échafaud. Je suis las de vivre. Tiens, regarde ! La rivière semble rouler du sang ? – C’est vrai, dit Souberdielle, le ciel est rouge, il y a bien d’autres pluies de sang derrière ces nuages ! Ces hommes là avaient demandé des juges inflexibles et ils ne veulent plus que des bourreaux complaisants. Quand je refuse une tête innocente à leur couteau, ils appellent ma conscience scrupule. Mais que puis-je, moi ? continua Souberdielle avec abattement. Je ne suis qu’un patriote obscur. Ah ! si j’étais Danton ? – Danton dort, tais toi, répondit le rival de Robespierre à Souberdielle. Il se réveillera quand il en sera temps. Tout cela commence à me faire horreur. Je suis un homme de révolution, je ne suis pas un homme de carnage. Mais toi, poursuivit Danton en s’adressant à Camille DESMOULINS, pourquoi gardes-tu le silence ? – J’en suis las, du silence, répondit Camille DESMOULINS, la main me pèse ; j’ai quelquefois envie d’aiguiser ma plume en stylet et d’en poignarder ces misérables. Qu’ils y prennent garde ! Mon encre est plus indélébile que leur sang. Elle tache pour l’immortalité ! – Bravo, Camille DESMOULINS ! reprit Danton ; commence dès demain. C’est toi qui as lancé la révolution, c’est à toi de l’enrayer. – Sois tranquille, continua Danton d’une voix plus sourde, «cette main t’aidera. Tu sais si elle est forte.» Les trois amis se séparèrent à la porte de Danton.»

Le lendemain, Camille DESMOULINS avait écrit le premier numéro du «Vieux Cordelier».

« L’adjectif vieux ne renvoie guère qu’au district et indique le sens de l’opération : offensive des « indulgents » qui forment l’aile droite des Jacobins contre l’extrémisme des Cordeliers ». Le journal ne connaîtra que sept numéros. Camille DESMOULINS y dénoncera la terreur, et réclamera la création d’un « Comité de clémence ».