Dans la forêt de Saint-Michel-en-Thiérache existe une butte que l’on attribue à l’époque romaine et connue sous le nom de «Camp de Macquenoise.»
L.H. CATRIN dans ses «Etudes historiques sur Le Nouvion» la décrit alors ainsi (en 1870) :
«Ce n’est plus aujourd’hui qu’une vaste enceinte de un kilomètre de long sur cent à cent-cinquante mètres de large, formée de murs découronnés, autrefois défendue par des retranchements en terre, et dont la trace aussi bien dans le vestige tendent de plus en plus à disparaître.»
Cependant l’objet de L.H. CATRIN n’est pas, dans les lignes qui suivent, de lever le voile sur l’ originalité de ces vestiges, mais de nous faire entrer dans la confidence d’une légende colportée par la rumeur publique.
La Cabre d’Or
«… à propos d’un prétendu trésor que la rumeur publique, toujours aussi prompte que naïve, supposait exister à quelque distance sur une éminence voisine des retranchements.»
En fait, on dit qu’à une époque reculée, l’abbaye de Saint-Michel-en-Thiérache était sous la coupe d’un abbé qui n’avait de saint que l’habit, et qui avait alors la réputation de détrousser les voyageurs qui, perdus ou souhaitant faire une halte lors de leur voyage dans l’immense forêt ardennaise, souhaitaient l’asile auprès des moines de l’abbaye. l’abbé avait alors accumulé une véritable fortune, et l’avait convertie en une sculpture anodine, une cabre, d’assez grande taille… en or massif. Des recherches officielles furent lancées..; Les archives de l’ancien duché de Guise conservent la correspondance échangée à ce sujet entre différents employés du domaine. On y trouve des détails et des traits de mœurs intéressants pour une étude de l’ époque et pour une « approche de cette légende ».
C’était en Octobre 1723. Monsieur de la Lande, Maître général des eaux et forêts du duché de Guise fut informé par le procureur fiscal des grueries d’Hirson et de Saint-Michel-en-Thiérache, où il y a une butte de terre, que :
«On trouveroit, suivant le récit de gens du pays, un trésor qui auroit esté enfui pendant les dernières guerres ; sur quoy, pour ne rien négliger dans une affaire de cette conséquence, et vu l’impossibilité où il estoit de s’y rendre, à cause de la vente extraordinaire des bois, Monsieur de la Lande ordonna au procureur fiscal de faitre travailler des gens du pays pour rechercher ce trésor. Pour agir avec plus de sûreté on eut recours à un nommé Denis VANDENAWES, devin flamand qui s’en vint sur les lieux, avec la baguette divinatoire».
Après quelques heures de recherches
«-C’est là qu’est le trésor, s’écrie le devin, le seigneur par sa grâce m’y a conduict.» «Les ouvriers se sont de suite mis à l’ouvrage ; mais à peine ils avoient commencé quand un grand nombre de bandits des Pays-Bas autrichiens qui habitent près de ce lieu, avoient eu connaissance du travail qu’ en faisoit, et que s’estant assemblés ils avoient pris la résolution d’aller attaquer les ouvriers, de se rendre maistres des lieux et de fouiller eux même après la beste. Sur quoi le procureur fiscal en ayant donné avis à Monsieur de la Lande, celui-ci dépêcha un ouvrier à Monsieur de la Grange, Commandant de Rocroy, pour lui demander trente grenadiers avec un officier pour estre en estat de repousser ces scélérats, s’ils se mettaient en devoir d’entreprendre quelque chose. Mais estant à nouveau averty que les bandits s’estoient assemblés au nombre de deux cents et qu’ils estoient dans le destin d’exécuter leur premier projet, Monsieur de la Lande ordonna au procureur fiscal de faire combler le trou qui avait trente-six pieds de profondeur, au fond duquel on avait même trousvé une voute, ce qui donnait lieu d’ espérer un succès favorable, et de faire retirer les ouvriers et les soldats et d’examiner ponctuellement si ces bandits n’entreprenoient pas de faire la même recherche, en attendant qu’il put avertir le Conseil et recevoir les ordres qu’il jugerait à propos de lui donner.»
Après délibéré, Monsieur de Prougen fut chargé d’informer Monsieur de la Lande qu’il y avait lieu de suspendre les recherches commencées, de renvoyer le détachement de Rocroy et de commettre quelques gardes à la surveillance des lieux.