Eglise saint Nicolas

A l’emplacement de l’ancien oratoire sur la rive gauche du Ton, Aubenton aura une seconde église édifiée en 1257 sous Nicolas V. Le chanoine Pire souligne: « Dès lors, la partie de la ville au midi de cette rivière prît le nom de faubourg saint Nicolas. Une charte datée de 1259 d’Itiers, évêque de Laon donne pour succursale de la paroisse Notre Dame, celle de saint Nicolas et de l’abbaye de Saint Michel en Thiérache le droit de collation à la nouvelle chapelle (…) Cette seconde église à Aubenton est un signe évident de la prospérité de la ville. Il est supposable qu’elle a été bâtie par les manufacturiers d’étoffes appelés « Foulons » dont les effigies avec des cuirs qui se voyaient sur frontispice de l’ancien portail tombé en 1682. » En 1790, l’administration départementale de l’Aisne ordonne la suppression de la cure saint Nicolas sous prétexte que la ville ne compte guère que 12 à 1300 âmes et que la distance entre chaque église n’est que de cent toises. L’édifice est abandonné par le clergé. Il servira de grange à foin puis de fabrique de salpêtre. La Vierge Bleue, patronne de la paroisse est transportée à l’église Notre Dame. Le cimetière délaissé fait l’aubaine d’un maraîcher. Il espérait bien tirer profit de sa terre. Il oublie pour que la communauté aubentonnaise « c’était la terre des morts. » Adieu les bonnes affaires !

L'église Notre Dame d'Aubenton
Réseau souterrain

La particularité du sous-sol d’Aubenton réside dans ses caves. Il est avancé sans certitude que les souterrains d’Aubenton auraient été creusés sous Edouard III, roi d’Angleterre après la prise de la ville en 1340. Ces galeries profondes disposées en toile d’araignées se déploient depuis la tour-clocher de l’église en direction d’habitations voisines voire vers la commune de Rumigny (Ardennes). Ce qui reste à prouver ! L’historien Jehan Froissart donne sa version: « Cette ville était autrefois fort commerçante en étoffes et en vins pour la Flandre. Les caves d’une hauteur et d’une étendue considérable qui s’y trouvent en font foi. Elles sont, certaines, d’une élévation à pouvoir y tourner une voiture à foin, ayant les voûtes coordonnées de 4 à 8 mètres de hauteur, faites de carreaux de pierres de taille. »

caves et souterrains d'Aubenton

caves et souterrains d’Aubenton

« Des portes de communication en fer prouveraient que les caves servaient aussi de casemates et de retraite aux habitants dans les temps de guerre, et que l’on s’y défendit. Elles étaient reliées entre elles par des couloirs formant un réseau de circulation. L’église Notre Dame en est le centre et où convergent toutes les issues. » « Il y avait une vingtaine de caves sur deux voire trois niveaux. Elles comportent de vastes salles de 25 à 30 m² avec une cheminée d’aération. Chaque cave a son puits ou bien encore comme à l’Hôtel de ville un réservoir de bonne dimension creusé dans le tuf. » Ces caves servent de refuge durant les guerres mondiales. Au fil des années, elles essuient les outrages du temps, les éboulements et le dépôt sauvage d’ordures ménagères. Obturées ou comblées, elles ne sont plus accessibles. Dommage !

Mémoire du passé

La porte du Jeton est détruite en 1793, celle du Vieux moulin à l’opposé et de saint Nicolas au midi le sont en 1805 sur arrêté préfectoral pour leur « état de ruine et de vétusté menaçant la sécurité publique. » La Tour de Chimay [1612] est reconvertie en Gîte rural communal sur l’insistance du Dr Alain Schlienger (auteur de deux ouvrages sur Aubenton). Quant à la Tour Daniel sur la rive droite de la rivière le Ton, elle appartient à un privé. Lors de travaux de terrassement pour la construction du bureau de Poste en 1950 en aval de la Tour Daniel, il a été mis au jour un dallage en parfait état de conservation ainsi qu’une plaque de cheminée [taque] aux armes de Lorraine. Ces vestiges du passé n’ont fait l’objet d’aucune attention! En revanche, le mur d’enceinte encercle toujours la ville. A l’emplacement de l’actuel monument aux morts se situait une halle. Elle comprenait en sa partie supérieure une vaste salle qui servait de prétoire, d’auditoire et d’Hôtel de ville. Elle a été détruite en 1868 sur décision du conseil municipal.

La maison du duché de Guise

La maison du duché de Guise

Maison du duché de Guise

Aubenton ne possédait de château. Le fief appartenait au comte du Vermandois ; Avoye, sa fille, épousera en 1013, Geoffroy ou Godfroy, seigneur de Florennes. Il apporte dans la corbeille de mariée les communes d’Aubenton, Martigny et Rumigny. Il paraîtrait que les princes de Condé qui possédaient un château entre le XIIème et le XVIIIème siècle à Condé- en-Brie (Aisne) prendraient leurs racines en cette commune. C’est en 1610 que Charles IV de Lorraine fera construire sur la place d’Aubenton une demeure dénommée Maison du duché de Guise. Cette maison passera entre les mains de Louis Henri de Bourbon, prince de Condé. Il installe un pavillon de chasse pour se rendre dans la forêt domaniale de la Haie d’Aubenton et de celle du Nouvion en Thiérache.

Drame chez les Condé

La famille d’Orléans serait soupçonnée de crime. Selon les historiens, Louis Henri le dernier des Condé serait mort accidentellement au cours d’une partie de plaisir… Il avait pour amie Sophie Dawes qui demeurait au pavillon d’Aubenton ; une ancienne prostituée de Londres dont le prince avait fait la connaissance lors de l’un séjour en Grande-Bretagne. En 1818, le prince décide qu’elle doit épouser le baron Feuchères, officier de la garde Royale. Le 27 août 1830 c’est un autre son de cloche qui retentit au château de saint Leu, propriété du prince, son valet trouve le prince Henri de Condé pendu à l’espagnolette de la fenêtre de sa chambre. Une enquête est ouverte. Les soupçons pèseront sur Sophie Dawes, baronne de Feuchères. Ce qui advint ? Secret de l’instruction…

Epilogue

A la mort du prince, sa fortune et le château de Chantilly reviennent de droit au duc d’Aumale [1822-1897], son neveu. Le duc légataire universel ne relèvera le titre. Il fait don de ses biens à l’Etat. Actuellement le château de Chantilly abrite le musée des princes de Condé où prône le duc d’Aumale. Quant à l’hostellerie du vieux manoir – Ancien duché de Guise [1610] il passe aux mains de Polliart Saint-Denis qui le lègue à la comtesse de Poligny, sa nièce. Fin d’une époque, le pavillon – Maison du duché de Guise appartient à présent à un privé.

Jacky Billard